On diraît pas comme ça. Mais c'est la meilleure image que j'ai trouvée pour me décrire. Non pas que je filtre des litres d'eau par jour pour me nourir ou que je repose tranquillement dans la vase des marais charentais (et pour ceux qui se réfèrent à wikipédia, ça n'a pas non plus de rapport avec mon QI). Non, non, mon point commun avec les vénérables fruits de mer, c'est plutôt l'aspect défensif.

Comme ces pauvres bivalves, je me suis formé une sorte de carapace, une enveloppe blindée en titane (parce que c'est léger, résistant et que ça brille) pour me protéger des agressions extérieures. La coquille à peine entrouverte, je laisse filtrer doucement ce qui se passe autour, mais au moindre signe de danger, clac, on rabat le couvercle (attention les doigts !). Et vas-y pour ouvrir une huître réfractaire. Soit tu lui exploses le coquillage (tout de suite, c'est moins présentable), ou tu lui sectionnes les muscles (technique de l'ostréiculteur averti, demandez à Maïté). Dans tous les cas, les dégats sont importants, et la probabilité de se blesser avec le couteau anormalement élevée.

Voilà pourquoi peu de gens me connaissent. Enfin me connaissent vraiment. Parce que sinon, je connais quand même du monde. Croyez pas... Je suis pas la petite huître solitaire oubliée au fond d'une claire à Marennes-Oléron (quoique je l'ai été). Non, moi, je suis l'huître qui a bien grandi et fait le tour des foires ostréicoles. Pour un peu, j'aurais pu serrer la main à un ministre ou un président, si les huîtres avait des mains. Bref, j'ai mes contacts, on a admiré l'élégance de mon enrobage calcaire, mais pas grand monde a vu l'intérieur.

Parce que c'est fragile. Et que l'exposer, c'est prendre un risque (Vous avez pas vu ce qui est arrivé aux petites huîtres curieuses dans Alice au pays des merveilles ? Toutes mangées !). Et que les risques, moi, j'aime pas ça. Surtout à ce niveau-là. Je préfère calculer, anticiper, et miser sur la politique du 0% d'aléatoire. D'où l'accès hautement sécurisé et les barrières électrifiées. C'est aussi pour ça que les rares phrases qui trahissaient un semblant de sentiment ou d'émotion dans ce blog jusqu'à présent se transformaient immanquablement en un développement beaucoup plus impersonnel, sous forme de profond raisonnement philosophique (enfin théologique plutôt, parce que j'essaie généralement de garder une bonne base biblique). La tactique de l'évitement, de l'esquive.

Eh oui, c'est dur de s'ouvrir aux autres, de révéler son moi profond et véritable aux gens qui nous entourent. Enfin, pour moi, ça l'est. Et le deuxième effet kiss-cool, c'est que ça donne l'image d'un type froid, arrogant et condescendant. Genre je-sais-tout mais je dirai rien (ou l'inverse...). Qui a des conseils en stock pour tout le monde, mais qui ferait bien de les appliquer lui-même. Celui qui voudrait faire un monde meilleur et à qui on n'ose pas dire que la plus grosse partie du boulot serait faite en le changeant, lui. Parce que les gens, ça a toujours une opinion sur les autres (même si elle est neutre, on n'est pas tous binaires). Et si on n'a pas accès aux infos certifiées conformes, on se base sur l'emballage, qui peut être trompeur, pour se faire une idée du type.

Mais ne perdons pas espoir. Je me soigne. Enfin, j'essaie. Je fais des efforts, et avec le temps (et l'aide de Dieu), j'arriverai à faire quelques progrès. J'ose espérer que j'ai déjà quelque peu avancé depuis l'année dernière, voire même l'année avant. Donc n'oubliez pas que pour les téméraires, ceux qui arriveront à pénétrer au-delà de la barrière de nacre, vous trouverez peut-être une perle, jalousement gardée, bien au chaud et à l'abri. Ou pas. Y'a des fois où je suis plus très sûr non plus de ce qui s'y trouve.