Le syndrome Chicken Little
Par Spica le Vendredi 13 octobre 2006, 09:37 - Je pense donc j'écris - Lien permanent
Tout d'abord, une petite mise au point culturelle pour ceux qui ne connaîtraient pas le dessin animé. Chicken Little est un petit poulet (comme son nom l'indique) sans histoire qui vit seul avec son père (depuis la mort de sa tendre maman), jusqu'au jour tragique où tout bascule : ce jour-là, un morceau du ciel lui tombe sur la tête ! Et toute volaille qu'il est, le petit Chicken n'est pas une poule mouillée. N'écoutant que son courage, il se précipite au clocher du village pour sonner le tocsin. Panique dans le village, tout le monde s'affole sans savoir pourquoi, jusqu'à ce que les regards convergent vers le timide gallinacé. Malheureusement pour lui, la foule incrédule refuse d'écouter ses mises en gardes et le tourne en ridicule. Le pauvre héros, croyant bien faire, s'est attiré les foudres de tous les habitants du bourg, et même son père a honte de lui.
Un an plus tard, alors que cet échec cuisant est encore un douloureux souvenir dans sa mémoire, Chicken Little manque de se faire écraser par un nouveau bloc azuré. Cette fois-ci, plus aucun doute sur ce qui a pu se passer l'année précédente, mais un délicat dilemme s'offre au courageux volatile : il peut soit tenter d'alerter à nouveau ses concitoyens, au risque de devoir affronter de nouveau le mépris et la dérision, soit se taire pour préserver sa dignité et la fierté de son père récemment acquise, mais mettant par là même en péril la survie de toute la population. Il va devoir faire un choix difficile, entre la responsabilité qui lui incombe de sauver ses compatriotes, et la peur d'une nouvelle humiliation publique, avec toutes ses cruelles conséquences.
Maintenant, quelle leçon peut-on tirer de ces deux paragraphes hautement pédagogiques ? Un simple parallèle avec la vie chrétienne. D'un côté, une mission importante nous a été confiée par Jésus lui-même :
Marc 16:15-16
"Allez par tout le monde, et prêchez la bonne nouvelle à toute la création. Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé, mais celui qui ne croira pas sera condamné."
Voilà un message d'importance capitale ! Nous sommes chargés de mettre en garde nos contemporains face à la terrible menace qui plane sur ceux : celle d'une éternité sans Dieu. Et notre responsabilité est claire :
Ezéchiel 33:7-9
"Et toi, fils de l’homme, je t’ai établi comme sentinelle sur la maison d’Israël. Tu dois écouter la parole qui sort de ma bouche, et les avertir de ma part. Quand je dis au méchant: Méchant, tu mourras ! si tu ne parles pas pour détourner le méchant de sa voie, ce méchant mourra dans son iniquité, et je te redemanderai son sang. Mais si tu avertis le méchant pour le détourner de sa voie, et qu’il ne s’en détourne pas, il mourra dans son iniquité, et toi tu sauveras ton âme."
Notre charge est d'autant plus cruciale qu'il y a un moyen de salut pour tous ces gens. Mais lorsque nous nous taisons, nous sommes coupable de non-assistance à personne en danger. Voilà un des grands échec de l'église en général, et de beaucoup de chrétiens en particulier (moi le premier). Combien d'hommes et de femmes sont morts sans qu'aucun chrétien de leur entourage n'ait pris la peine de leur rendre témoignage ?
Et le syndrome Chicken Little continue de faire des ravages ! Lorsqu'on a été échaudé après avoir tenté de parler de l'évangile à des amis, lorsqu'on s'est fait ridiculiser en voulant amener des collègues de travail au salut, on y réfléchit à deux fois avant de retenter l'expérience. Non seulement c'est humiliant d'être traité de la sorte, mais c'est aussi d'autant plus frustrant que l'on sait le sort qui attend les moqueurs, et d'autant plus douloureux que les personnes auxquelles on s'adresse sont proches de nous. Comment arriver à assumer son rôle de sentinelle sans devenir la risée des gens que l'on veut cherche à avertir ? Comment proclamer haut et fort le message de la croix sans s'attirer les quolibets et les sarcasmes ?
La réponse n'est malheureusement pas plaisante : il n'y a aucun moyen d'arriver à un tel résultat. L'avertissement de Jésus à ses disciples est toujours valable aujourd'hui :
"Vous serez haïs de tous, à cause de mon nom" (Matthieu 10:22) et "s‘ils m‘ont persécuté, ils vous persécuteront aussi" (Jean 15:20).
Seulement Jésus avait une point de vue tout à fait différent. Pour lui, les événements extérieurs avaient peu d'impact sur son message ou sur sa motivation, car il gardait les yeux fixés sur le but établi par Dieu : le salut des hommes. Il fixait résolument ses regards sur "celui qui juge justement" sans se laisser atteindre par les contingences terrestres. Au contraire, toute l'opposition qu'il recevait ajoutait à sa détermination, et en cela, il nous a demandé de l'imiter :
Luc 6:22-23
"Heureux serez-vous, lorsque les hommes vous haïront, lorsqu’on vous chassera, vous outragera, et qu’on rejettera votre nom comme infâme, à cause du Fils de l’homme ! Réjouissez-vous en ce jour-là et tressaillez d’allégresse, parce que votre récompense sera grande dans le ciel ; car c’est ainsi que leurs pères traitaient les prophètes."
Bien sûr la perspective immédiate n'est pas réjouissante, car toutes ces choses égratignent notre orgueil. Notre amour propre est atteint lorsque nous affrontons le rejet. Notre fierté est blessée lorsque nous sommes le sujet de moqueries. Voilà pourquoi il nous est dit de "crucifier la chair avec ses passions et ses désirs". Tous les mauvais penchants charnels, dont l'orgueil est le premier, doivent mourir, pour laisser place à la vie de l'esprit. Ce n'est qu'en acceptant de renoncer à nous-mêmes pour nous consacrer à l'oeuvre excellente de Christ que nous pourrons avoir le même détachement que lui face aux épreuves de toutes sortes et que nous trouverons le courage nécessaire pour aller de l'avant.
Et il n'est pas de meilleur exemple sous nos yeux pour nous fortifier que celui de la Croix, démonstration du renoncement total de Christ et preuve indiscutable de son amour infini pour nous. Il ne nous reste plus qu'à marcher dans les pas du maître...
Luc 9:23 "Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il renonce à lui-même, qu’il se charge chaque jour de sa croix, et qu’il me suive."
Commentaires
Ce qui est très gênant dans ta jolie analogie avec Little Chicken, c'est qu'apparemment le petit poulet a reçu un morceau de quelque chose sur la tête, et toi tu parles d'un message que tu as reçu dans ton coeur, ou dans ta raison, ou dans ta foi. Aller sonner le tocsin chez les autres qui n'ont pas reçu ce morceau en les prévenant d'un danger qui est le fruit de ta compréhension du monde n'est pas très convaincaint.
L'évangélisme est par conséquent ce qui me gêne le plus dans ton message (et dans celui des évangélistes en général). Il ne laisse absolument aucune place à l'existence de l'autre dans ce qu'il a de plus divin justement.
Le but d'un chrétien n'est pas de convaincre tout le monde de faire le même choix que lui (même si souvent on aimerait bien), mais de mettre en garde les gens sur le fait qu'ils sont pécheurs et devront passer devant Dieu au jour du jugement. Chacun est libre de tenir compte de l'avertissement ou pas, mais on ne peut pas se permettre de laisser les gens aller en enfer sans les avoir prévenus. Forcément, ceux qui ne prennent pas l'avertissement au sérieux ne pourront pas non plus en reconnaître la légitimité.
Voilà où se situe réellement le paradoxe : ceux à qui on va vouloir témoigner ne croient pas à ce qu'on leur annonce, ils n'acceptent donc pas que nous cherchions à les convaincre de quelque chose qu'ils pensent faux...
Le paradoxe n'est pas que là, Spica, vous dites qu'il y a un enfer, comme si vous aviez reçu le morceau qu'a reçu Little Chicken sur la tête, c'est ça dont je parle. Or, vous parlez bien d'un système de croyances. D'autres croyants, n'ont pas de cet enfer dont vous parlez comme d'un fait avéré. D'où tout le paradoxe de votre témoignage. Et c'est ce que je trouve gênant dans l'évangélisation.
C'est peut-être cela qui vous attire les réactions négatives, voire agressives dont vous parlez dans votre post.
Cordialement.
C'est exactement cela : les gens ne veulent pas entendre parler d'enfer et ne veulent pas y croire. Mais en même temps, si je croyais que l'enfer n'existait pas, je n'aurais aucune raison de chercher à convaincre qui que ce soit : pourquoi vouloir convertir les gens malgré eux, alors qu'au fond, ils n'ont rien à craindre ni à perdre ?
Pourtant la Bible ne laisse aucun doute à ce sujet.
Le syndrome Chicken Little
AMEN!
J’ai lut ton article et je dis amen. Pourquoi ? PARCE-Q’UN JOUR NOUS AVONS PASSER PAR UNE TEL EXPERIENCE. Non, je n’ai pas reçu un morceau du ciel sur la tète. Mais un jour, j’ai témoigné et reçu le mépris, puis je n’ai plus osez parler de Jésus de peur de recevoir à nouveau le rejet. Mais ne restons pas sous la condamnation, car Dieu sait ce qu’il fait. Que 2007 soit une année de témoignage pour sa gloire, amen. Dominique
Amen ! Bon courage pour cette nouvelle année.