Mais je ne fais pour moi-même aucun cas de ma vie, comme si elle m’était précieuse, pourvu que j’accomplisse ma course avec joie, et le ministère que j’ai reçu du Seigneur Jésus, d’annoncer la bonne nouvelle de la grâce de Dieu.
Actes 20:24

« Annoncer la bonne nouvelle de la grâce de Dieu »  : voilà l'objectif qui avait été fixé pour Paul, et qu'il a poursuivi tout au long de sa vie, suite à la révélation sur le chemin de Damas. Un objectif qu'il a cherché à remplir en prêchant et en fondant des églises dans toute l'Asie, mais aussi en rédigeant ses fameuses épîtres. Parmi elles, l'épître aux Romains est l'un des meilleurs traités de théologie qui soit. Il y explique en détails les grandes lignes de la foi chrétienne et les doctrines qu'il s'est évertué à enseigner jusqu'à sa mort. Au sein de ce formidable ouvrage, on trouve un réquisitoire très élaboré sur la condition de l'homme et sur les effets de la grâce de Dieu. Dans les chapitres 5 à 8 en particulier, que nous allons survoler dans cette étude, Paul explique clairement la portée et les effets de la grâce de Dieu dans la vie de l'homme. Parmi ces attributs, nous allons nous pencher principalement sur trois aspects de la grâce de Dieu et voir en quoi elle est Indispensable, Inconditionnelle et Infiniment puissante.

Indispensable

 Que dirons-nous donc ? La loi est-elle péché ? Loin de là ! Mais je n'ai connu le péché que par la loi. Car je n'aurais pas connu la convoitise, si la loi n'avait dit : Tu ne convoiteras point. Et le péché, saisissant l'occasion, produisit en moi par le commandement toutes sortes de convoitises ; car sans loi le péché est mort. Pour moi, étant autrefois sans loi, je vivais ; mais quand le commandement vint, le péché reprit vie, et moi je mourus.

Ainsi, le commandement qui conduit à la vie se trouva pour moi conduire à la mort. Car le péché saisissant l'occasion, me séduisit par le commandement, et par lui me fit mourir. La loi donc est sainte, et le commandement est saint, juste et bon. Ce qui est bon a-t-il donc été pour moi une cause de mort ? Loin de là ! Mais c'est le péché, afin qu'il se manifeste comme péché en me donnant la mort par ce qui est bon, et que, par le commandement, il devienne condamnable au plus haut point.

Nous savons, en effet, que la loi est spirituelle ; mais moi, je suis charnel, vendu au péché. Car je ne sais pas ce que je fais : je ne fais point ce que je veux, et je fais ce que je hais. Or, si je fais ce que je ne veux pas, je reconnais par là que la loi est bonne. Et maintenant ce n'est plus moi qui le fais, mais c'est le péché qui habite en moi. Ce qui est bon, je le sais, n'habite pas en moi, c'est-à-dire dans ma chair : j'ai la volonté, mais non le pouvoir de faire le bien. Car je ne fais pas le bien que je veux, et je fais le mal que je ne veux pas. Et si je fais ce que je ne veux pas, ce n'est plus moi qui le fais, c'est le péché qui habite en moi. Je trouve donc en moi cette loi : quand je veux faire le bien, le mal est attaché à moi. Car je prends plaisir à la loi de Dieu, selon l'homme intérieur ; mais je vois dans mes membres une autre loi qui lutte contre la loi de mon entendement, et qui me rend captif de la loi du péché qui est dans mes membres. Misérable que je suis ! Qui me délivrera de ce corps de mort ? 
Rom 7:7-24

Sans la grâce de Dieu, nous sommes tous pécheurs et perdus. Notre nature charnelle nous pousse au péché, et devant Dieu, nous sommes tous sans excuses. Aucun (autre que Christ) n'a jamais vécu une vie conforme aux exigences de Dieu :

 Car tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu... 
Rom 3:23 

En conséquence, l'homme livré à lui-même n'a pas de solution, aucune chance de salut. C'est ancré dans notre cœur, dans notre nature profonde depuis la chute d'Adam. L'homme est tortueux et rebelle à la voix de Dieu, ce qui le prive de communion avec Lui, aujourd'hui déjà, mais aussi pour l'éternité.

Sans la grâce de Dieu, aucun espoir. Nous sommes destinés à la condamnation sans possibilité de rédemption. C'est donc en cela qu'elle nous est indispensable. Il n'est pas d'autre moyen pour nous d'obtenir le pardon. Aucun autre chemin que Christ n'existe pour revenir au Père. C'est le chemin de la repentance, le chemin de la Croix qui nous permet d'entrer pleinement dans la promesse de Dieu et de recevoir son salut.

Imméritée et Inconditionnelle

 Si par l'offense d'un seul la mort a régné par lui seul, à plus forte raison ceux qui reçoivent l'abondance de la grâce et du don de la justice régneront-ils dans la vie par Jésus-Christ lui seul – ainsi donc, comme par une seule offense la condamnation a atteint tous les hommes, de même par un seul acte de justice la justification qui donne la vie s'étend à tous les hommes. Car, comme par la désobéissance d'un seul homme beaucoup ont été rendus pécheurs, de même par l'obéissance d'un seul beaucoup seront rendus justes. Or, la loi est intervenue pour que l'offense abonde, mais là où le péché a abondé, la grâce a surabondé, afin que, comme le péché a régné par la mort, ainsi la grâce règne par la justice pour la vie éternelle, par Jésus-Christ notre Seigneur. »
Rom 5:17-21 

Même si nous vivons aujourd'hui « sous la grâce et non plus sous la loi » (Rom 6 :14), cela ne signifie pas pour autant que la loi a été abolie. Christ lui-même l'a dit :

 Ne croyez pas que je sois venu pour abolir la loi ou les prophètes ; je suis venu non pour abolir, mais pour accomplir. 
Matthieu 5:17

Aussi nous ne sommes plus soumis aux lois rituelles du peuple juif qui avaient une valeur prophétique et annonçaient la venue de Jésus (celles-là ont été accomplies comme il le dit et n'ont alors plus lieu de subsister), mais la loi morale de Dieu s'applique toujours à nous, à commencer par son commandement de lui accorder la première place dans nos vies.

Ce que Paul a voulu dire par cette expression, c'est que nous sommes libres de l'emprise du péché qui nous poussait à agir à l'encontre de la loi de Dieu et nous condamnait donc immanquablement. En vivant sous la grâce, nous avons été libérés non pas des exigences de la loi mais bien du joug du péché qui nous exposait au châtiment que requérait la loi.

La grâce ne s'oppose donc pas à la loi : elle permet à Dieu d'exprimer son amour tout en y restant conforme.

Car tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu ; et ils sont gratuitement justifiés par sa grâce, par le moyen de la rédemption qui est en Jésus-Christ.
Rom 3:23-24 

La sanction du péché demeure, seulement elle ne nous atteint plus puisqu'elle est tombé sur Christ, notre sacrifice expiatoire. Plus encore, la portée de cette grâce dépasse notre entendement. Elle va au-delà de ce que nous pouvons imaginer : au travers d'elle, Dieu pardonne toutes nos fautes, sans exceptions. Il n'est pas de péché trop important pour qu'il ne soit pas couvert par le sacrifice de Christ. Il n'est pas d'homme qui ait trop péché pour que sa situation soit irréversible. « Là où le péché à abondé, la grâce à surabondé ».

Le pardon est une chose qui, à cause de notre nature pécheresse nous semble difficile, mais il est dans la nature même de Dieu. Croire que certaines de nos actions sont impardonnables, c'est d'une part douter de la nature de Dieu, de son amour, mais c'est aussi minimiser la portée du sacrifice de la Croix. Une seule offense suffit à faire de nous des pécheurs, mais l’œuvre de Christ au Calvaire suffit à nous justifier quelque soit notre parcours, quelles que soient nos fautes.

Dieu ne se lasse pas de pardonner (Ésaïe 55:7), c'est un fait, et sa grâce, au travers du sang versé de Christ, est suffisante pour nous purifier de tout péché. Bien sûr, cela ne signifie pas que nous puissions en profiter pour nous livrer à la débauche, sous prétexte que la grâce de Dieu nous pardonnera.

 Que dirons-nous donc ? Demeurerions-nous dans le péché, afin que la grâce abonde ? Loin de là ! Nous qui sommes morts au péché, comment vivrions-nous encore dans le péché ? 
Rom 6:1-2 

C'est le genre de faux enseignement qui minait la vie de l'église de Corinthe, et contre lequel Jude mettait en garde les chrétiens auxquels il s'adressait dans sa lettre :

Car il s'est glissé parmi vous certains hommes dont la condamnation est écrite depuis longtemps, des impies, qui changent la grâce de notre Dieu en dérèglement, et qui renient notre seul maître et Seigneur Jésus-Christ.
Jude 1:4

Nous sommes donc toujours appelés à vivre en accord avec la loi morale de Dieu, et même à un niveau plus élevé que sous l'ancienne alliance puisque Jésus affirme que nos pensées et nos intentions sont toutes aussi condamnables que nos actions (la convoitise est aussi grave que l'adultère, et l'insulte aussi grave que le meurtre). Nous nous devons donc, en vivant « sous la grâce » d'avoir une conduite encore plus irréprochable.

Infiniment puissante

Mais comment atteindre cette conduite irréprochable alors que nous avons vu qu'elle est contraire à notre nature ? Là encore, la réponse est la même, c'est au travers de la grâce de Dieu.

 Il n'y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ. En effet, la loi de l'Esprit de vie en Jésus-Christ m'a affranchi de la loi du péché et de la mort. Car – chose impossible à la loi, parce que la chair la rendait sans force – Dieu a condamné le péché dans la chair, en envoyant, à cause du péché, son propre Fils dans une chair semblable à celle du péché, et cela afin que la justice de la loi soit accomplie en nous, qui marchons, non selon la chair, mais selon l'Esprit.

Ceux, en effet, qui vivent selon la chair s'affectionnent aux choses de la chair, tandis que ceux qui vivent selon l'Esprit s'affectionnent aux choses de l'Esprit. Et l'affection de la chair, c'est la mort, tandis que l'affection de l'Esprit, c'est la vie et la paix ; car l'affection de la chair est inimitié contre Dieu, parce qu'elle ne se soumet pas à la loi de Dieu, et qu'elle ne le peut même pas. Or, ceux qui vivent selon la chair ne sauraient plaire à Dieu. Pour vous, vous ne vivez pas selon la chair, mais selon l'Esprit, si du moins l'Esprit de Dieu habite en vous. Si quelqu'un n'a pas l'Esprit de Christ, il ne lui appartient pas. »

C'est la grâce de Dieu qui nous transforme. Non seulement elle nous accorde le pardon et le rachat, mais elle agit de manière puissante dans notre vie. Elle contribue à faire mourir en nous notre nature charnelle et rebelle et à développer une nouvelle nature, divine et sainte.
Rom 8:1-9 

La grâce de Dieu ne se limite donc pas à son pardon. Ce n'est pas un don ponctuel, un événement limité dans le temps. Elle est active, agissante, continue. Elle poursuit jour après jour son œuvre en nous. Elle nous régénère intérieurement et nous donne la puissance d'agir conformément aux aspirations nées en nous suite à notre repentance.

 Car la grâce de Dieu, source de salut pour tous les hommes, a été manifestée. Elle nous enseigne à renoncer à l'impiété et aux convoitises mondaines, et à vivre dans le siècle présent selon la sagesse, la justice et la piété, en attendant la bienheureuse espérance, et la manifestation de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ.  Tite 2:11-13 

Et son action va même encore au-delà. Non seulement elle nous aide à nous conformer à la nature de Dieu, mais elle produit même une énergie et un désir de servir Dieu qui nous transcendent. Les liens du péchés sont brisés par elle, nous sommes libres de ne plus chuter, mais elle nous rend même productifs pour le royaume de Dieu. Elle nous pousse à nous investir pour Lui. Elle nous donne l'envie de lui être utile de toutes les manières possibles. Elle fait de nous des serviteurs zélés et engagés pour la cause divine. Paul en est l'exemple type  :

Par la grâce de Dieu je suis ce que je suis, et sa grâce envers moi n'a pas été vaine ; loin de là, j'ai travaillé plus qu'eux tous, non pas moi toutefois, mais la grâce de Dieu qui est avec moi.
1 Corinthiens 15:10 

La grâce qu'il a reçue l'a délivré de son péché et du poids de la culpabilité qui l'accompagnait, lui le meurtrier et le persécuteur des chrétiens, mais elle a fait aussi fait de lui un des apôtres les plus efficaces de l'histoire de l'église. Par cette grâce, il a voyagé dans tout le bassin méditerranéen, il a ouvert des églises un peu partout en Asie et en Europe, il a prêché aux gens du peuple comme aux plus hauts dignitaires, il a envoyé un très grand nombre de lettres dont plusieurs ont survécu jusqu'à aujourd'hui pour faire partie de la Bible.

Conclusion

La grâce de Dieu est un concept à la fois extrêmement important pour la vie du chrétien, mais aussi relativement compliqué à comprendre avec notre intelligence humaine. Elle relève réellement de l'intelligence et de l'amour de Dieu et nous avons besoin de toute l'assistance du Saint Esprit pour en saisir la portée. Mais au fur et à mesure que nous en approfondissons notre compréhension, nous ne pouvons qu'être touché au plus au point par les merveilles qu'elle renferme.

Accepter qu'elle arrive à couvrir toutes nos fautes, à nous libérer de tout fardeau est quelque chose de difficile lorsque nous sommes convaincus de péché. Lorsque l'importance de notre péché se révèle à nos yeux, elle est écrasante. C'est un poids qui nous détruirait si Dieu n'y répondait pas immédiatement par la révélation de l'immensité de son amour. Ce sont deux infinis qui entrent en collision frontale : l'infinie culpabilité de l'offense qui a été faite à Dieu, balayée par la grâce infinie de ce même Dieu qui la couvre entièrement.

Mais limiter la grâce de Dieu à son seul pardon, quelle qu'en soit l'ampleur, serait encore une erreur. Si en grec le mot « charis » est traduit par « grâce » ou « don », il a inspiré à Paul un néologisme : « charisma », que nous traduisons souvent aujourd'hui par « don spirituel » ou « charisme » (mais cela ne se limite pas à la liste de 1 Corinthiens 12, puisque le premier de ces dons spirituels évoqué par Paul est la vie éternelle). La grâce est ainsi associée à l'action surnaturelle du Saint Esprit dans nos vie. Elle devient force, puissance agissante, énergie qui nous remplit et nous pousse de l'avant. C'est cette grâce qui nous soutient chaque jour et nous aide à progresser dans notre marche spirituelle et jour après jour, l’œuvre qu'elle produit en nous contribue aussi à nous aider à la comprendre davantage.