Il y a deux notions de patience dans la Bible :

  • la patience comme synonyme de longanimité (= makrothumia). C'est la patience de Dieu à notre égard par exemple, ou celle dont nous pouvons faire preuve à l'égard des autres.
  • La patience comme synonyme de persévérance, d'endurance (= hupomonê). C'est la patience du croyant qui tient ferme dans l'adversité.

Les deux sens peuvent être proches ou se rejoindre dans certains cas, mais c'est surtout le second qui nous intéresse ici. La patience dans l'épreuve. La patience dans l'attente d'une promesse. La patience qui résiste au découragement. La patience qui se soumet au plan de Dieu.

La patience : ce qu'elle est, ce qu'elle n'est pas

Être patient, c'est avant tout croire sans douter que les promesses de Dieu vont s'accomplir. Ce que Dieu a annoncé est inéluctable, mais parfois, le résultat se fait attendre. Dieu peut avoir diverses raison de retarder l'accomplissement de ce qu'il a annoncé, mais la patience dans ces cas-là va de paire avec la foi.

Abraham en est un très bon exemple, comme Joseph, Moïse ou David qui ont eux aussi attendu de voir l'accomplissement des promesses de Dieu dan s leur vie :

« Lorsque Dieu fit la promesse à Abraham, ne pouvant jurer par un plus grand que lui, il jura par lui-même, et dit: Certainement, je te bénirai et je multiplierai ta postérité. Et c'est ainsi qu'Abraham, ayant persévéré, obtint ce qui lui avait été promis. »
Heb 6:13-15

Mais il est important de noter l'attitude dans laquelle tous ont attendu cet accomplissement. Patienter pour eux ne signifiait pas supporter à contre-cœur les circonstances parce qu'on n'a pas le choix. Se plaindre de notre situation, c'est justement montrer que l'on n'est pas capable d'attendre avec foi.

« Et pour que je ne sois pas enflé d'orgueil, à cause de l'excellence de ces révélations, il m'a été mis une écharde dans la chair, un ange de Satan pour me souffleter et m'empêcher de m'enorgueillir. Trois fois j'ai prié le Seigneur de l'éloigner de moi, et il m'a dit : Ma grâce te suffit, car ma puissance s'accomplit dans la faiblesse. Je me glorifierai donc bien plus volontiers de mes faiblesses, afin que la puissance de Christ repose sur moi. C'est pourquoi je me plais dans les faiblesses, dans les outrages, dans les calamités, dans les persécutions, dans les détresses, pour Christ ; car, quand je suis faible, c'est alors que je suis fort. »
2 Corinthiens 12:7-10

Ce que Paul nous encourage à faire ici, ce n'est pas à se réjouir de traverser les moments durs sans raison, et encore moins de les rechercher. Dieu ne nous demande pas d'être masochistes. Dieu ne nous interdit pas non plus de partager nos difficultés avec nos frères et sœurs pour qu'ils puissent nous soutenir, notamment dans la prière, bien au contraire. Mais être réellement patient, c'est arriver à accepter ces difficultés malgré la douleur qu'elles peuvent représenter et le peu de visibilité que nous avons sur les raisons que Dieu a de nous faire passer par là.

Ce n'est pas non plus une résignation désabusée de notre part : la patience est au contraire associée dans la Bible à une espérance, à l'attente de quelque chose de meilleur (dans cette vie ou dans l'éternité), par la foi. Et non seulement cette attente n'est pas résignée, mais c'est un choix volontaire de notre part. Jacques, entre autres, nous exhorte à être patients : les verbes qu'il emploie à l'impératif montrent qu'il y a une action et un choix à faire de notre part.

« Soyez donc patients, frères, jusqu'à l'avènement du Seigneur. Voici, le laboureur attend le précieux fruit de la terre, prenant patience à son égard, jusqu'à ce qu'il ait reçu les pluies de la première et de l'arrière-saison. Vous aussi, soyez patients, affermissez vos cœurs, car l'avènement du Seigneur est proche. Ne vous plaignez pas les uns des autres, frères, afin que vous ne soyez pas jugés : voici, le juge est à la porte.

Prenez, mes frères, pour modèles de souffrance et de patience les prophètes qui ont parlé au nom du Seigneur. Voici, nous disons bienheureux ceux qui ont souffert patiemment. Vous avez entendu parler de la patience de Job, et vous avez vu la fin que le Seigneur lui accorda, car le Seigneur est plein de miséricorde et de compassion »
Jacques 5:7-11

Pourquoi être patient ?

« Mais il faut que la patience accomplisse parfaitement son œuvre, afin que vous soyez parfaits et accomplis, sans faillir en rien. »
Jacques 1:4

Toujours selon l'apôtre Jacques, la patience a un but particulier dans le plan de Dieu pour nous. Elle nous permet de grandir spirituellement, de progresser dans notre marche avec Dieu. C'est un signe de maturité dans la marche chrétienne. Mais au-delà de nous-même, ne perdons pas de vue que tout ce que Dieu fait est à sa gloire. Puisqu'il nous appelle à la patience, celle-ci a donc aussi pour but de révéler sa grandeur à la fois au travers de la façon dont nous endurons l'épreuve, mais aussi lorsqu'elle se termine.

« C'est là ce qui fait votre joie, quoique maintenant, puisqu'il le faut, vous soyez attristés pour un peu de temps par diverses épreuves, afin que l'épreuve de votre foi, plus précieuse que l'or périssable (qui cependant est éprouvé par le feu), ait pour résultat la louange, la gloire et l'honneur, lorsque Jésus-Christ apparaîtra. »
1 Pierre 1:6-7

Un chrétien qui tient ferme face aux difficultés jusqu'au bout est un témoignage pour ceux qui l'entourent. Il montre comment Dieu soutient dans les mauvais moments, mais aussi que sa foi n'a pas été vaine lorsque la délivrance qu'il attendait est arrivée.

« Mais nous nous rendons recommandables à tous égards, comme serviteurs de Dieu, par beaucoup de patience dans les tribulations, dans les calamités, dans les détresses, sous les coups, dans les prisons, dans les séditions, dans les travaux, dans les veilles, dans les jeûnes ; »
2 Corinthiens 6:4-5

Comment être patient ?

Si Dieu nous exhorte à la patience, il nous donne aussi les clés pour l'acquérir, comme l'explique là encore l'apôtre Jacques :

« Mes frères, regardez comme un sujet de joie complète les diverses épreuves auxquelles vous pouvez être exposés, sachant que l'épreuve de votre foi produit la patience. »
Jacques 1:2-3

Contrairement à la sagesse mentionnée deux versets plus loin que Dieu accorde à ceux qui la lui demandent, l'auteur montre que la patience n'est pas simplement « donnée » par Dieu, comme par miracle, mais qu'elle nous est « enseignée », et cet enseignement se fait par l'épreuve.

C'est notamment l'expérience qu'en a fait un pasteur dont la secrétaire venait de tomber malade. Il trouva alors une autre personne pour la remplacer le temps de son absence. Malheureusement, la bonne âme qui avait pris la place de la secrétaire était loin d'avoir les mêmes qualifications, et les erreurs dans les lettres, les courriers perdus ou non traités commençaient à exaspérer le pasteur. Jusqu'à ce qu'il se rappelle une prière qu'il avait adressé à Dieu peu de temps auparavant : « Apprends-moi à être davantage patient. » Le souvenir de cette prière lui a alors permis de réaliser que ces difficultés avaient été permises par Dieu pour une bonne raison, comme l'explique Rom 5:3 :

« Bien plus, nous nous glorifions même des afflictions, sachant que l'affliction produit la persévérance [ou patience = hupomonê], la persévérance la victoire dans l'épreuve, et cette victoire l'espérance. »

Mais si nous savons que les circonstances difficiles que nous traversons sont là pour nous enseigner la patience, Dieu nous donne aussi de nombreuses promesses dans sa Parole sur lesquelles nous appuyer, qui nous montrent qu'il a nos destinées entre ses mains.

« Ne vend-on pas deux passereaux pour un sou ? Cependant, il n'en tombe pas un à terre sans la volonté de votre Père. Et même les cheveux de votre tête sont tous comptés. Ne craignez donc point : vous valez plus que beaucoup de passereaux. »
Matth 10:29-31

Et non seulement cela, mais il a le meilleur en réserve pour nous.

« Nous savons, du reste, que toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu, de ceux qui sont appelés selon son dessein. »
Rom 8:28

Pour pouvoir supporter les difficultés et faire confiance à Dieu dans les tribulations, il faut donc avant tout être conscient de la fidélité et de la souveraineté de Dieu. Il faut réaliser profondément qu'il ne fera jamais défaut et que ses promesses sont certaines, comme le montre Jérémie dans Lam 3:19-23 :

« Quand je pense à ma détresse et à ma misère, A l’absinthe et au poison ; Quand mon âme s’en souvient, Elle est abattue au-dedans de moi. Voici ce que je veux repasser en mon cœur, Ce qui me donnera de l’espérance. Les bontés de l’Eternel ne sont pas épuisées, Ses compassions ne sont pas à leur terme ; Elles se renouvellent chaque matin. Oh ! que ta fidélité est grande ! »

« Dieu n'est point un homme pour mentir, Ni fils d'un homme pour se repentir. Ce qu'il a dit, ne le fera-t-il pas ? Ce qu'il a déclaré, ne l'exécutera-t-il pas ? »
Nombres 23:19

Plus encore, il nous assure qu'il nous soutiendra au temps de l'épreuve (1 Corinthiens 10:13).

« Aucune tentation ne vous est survenue qui n'ait été humaine, et Dieu, qui est fidèle, ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de vos forces ; mais avec la tentation il préparera aussi le moyen d'en sortir, afin que vous puissiez la supporter. »

Enfin, selon Galate 5:22-25, la patience fait partie du fruit de l'Esprit :

« Mais le fruit de l'Esprit, c'est l'amour, la joie, la paix, la patience, la bonté, la bienveillance, la foi, la douceur, la maîtrise de soi ; la loi n'est pas contre ces choses. Ceux qui sont à Jésus-Christ ont crucifié la chair avec ses passions et ses désirs. Si nous vivons par l'Esprit, marchons aussi selon l'Esprit. »

Et s'il est dit « LE » fruit de l'Esprit, c'est parce que toutes ces qualités devraient se retrouver chez le croyant, et pas seulement l'une ou l'autre, selon le caractère de chacun. Au contraire, elles sont intimement liées, comme le montre notamment 1 Corinthiens 13:4, qui affirme que « L'amour est patient... » Chercher à être rempli de l'amour de Dieu et à le manifester dans notre vie se manifestera donc (entre autres) par plus de patience.

L'encouragement de l'apôtre Paul pour acquérir cette vertu (et les autres), c'est donc de vivre et marcher selon l'Esprit, c'est-à-dire en nous soumettant à sa direction, en le laissant nous guider. Dieu peut ainsi faire son œuvre en nous, qui se manifestera par une conduite toujours plus empreinte de ces qualités. Rechercher la plénitude du Saint Esprit, nous conduira inévitablement à plus de patience.

Enfin marcher selon l'Esprit, c'est aussi garder les yeux sur les choses spirituelles, se focaliser sur le royaume de Dieu avant tout. Cela nous permet alors de nous détacher des choses temporelles et donc de patienter plus facilement, comme Jésus l'expliquait dans Matthieu 6:25-33 :

« C’est pourquoi je vous dis : Ne vous inquiétez pas pour votre vie de ce que vous mangerez, ni pour votre corps, de quoi vous serez vêtus. La vie n’est-elle pas plus que la nourriture, et le corps plus que le vêtement ? Regardez les oiseaux du ciel: ils ne sèment ni ne moissonnent, et ils n’amassent rien dans des greniers ; et votre Père céleste les nourrit. Ne valez-vous pas beaucoup plus qu’eux ? Qui de vous, par ses inquiétudes, peut ajouter une coudée à la durée de sa vie ? Et pourquoi vous inquiéter au sujet du vêtement ? Considérez comment croissent les lis des champs : ils ne travaillent ni ne filent; cependant je vous dis que Salomon même, dans toute sa gloire, n’a pas été vêtu comme l’un d’eux. Si Dieu revêt ainsi l’herbe des champs, qui existe aujourd’hui et qui demain sera jetée au four, ne vous vêtira-t-il pas à plus forte raison, gens de peu de foi ? Ne vous inquiétez donc point, et ne dites pas : Que mangerons-nous ? Que boirons-nous ? De quoi serons-nous vêtus ? Car toutes ces choses, ce sont les païens qui les recherchent. Votre Père céleste sait que vous en avez besoin. Cherchez premièrement le royaume et la justice de Dieu; et toutes ces choses vous seront données par-dessus. »

Dans la même idée, Jacques nous rappelle de garder à l'esprit l'imminence du retour de Christ comme sujet d'espérance pour supporter l'épreuve :

« Vous aussi, soyez patients, affermissez vos cœurs, car l'avènement du Seigneur est proche. »

Conclusion

Pour conclure tout cela, nous ne pouvons pas passer à côté de l'exemple suprême de Christ : la connaissance qu'il a eu toute sa vie de la mission à laquelle il était appelé n'a pas facilité son attente. Loin s'en faut, puisque la Bible dit qu'il a été éprouvé en toute chose comme nous (Héb 4:15) mais n'a jamais hésité à affronter le but fixé par Dieu en toute connaissance de cause. Une patience formidable qui culmine avec l'attente douloureuse de Gethsémané et les heures de torture jusqu'à la mort sur la croix.

Même écrasé par la souffrance physique et morale de sa crucifixion, Jésus ne se plaint pas. Il a imploré la grâce de Dieu, certes (« si tu peux éloigner de moi cette coupe ») mais accepte le chemin par lequel il doit passer (« non pas ma volonté, mais la tienne »).

« Nous donc aussi, puisque nous sommes environnés d'une si grande nuée de témoins, rejetons tout fardeau, et le péché qui nous enveloppe si facilement, et courons avec persévérance dans la carrière qui nous est ouverte, ayant les regards sur Jésus, qui suscite la foi et la mène à la perfection; en échange de la joie qui lui était réservée, il a souffert la croix, méprisé l'ignominie, et s'est assis à la droite du trône de Dieu. Considérez, en effet, celui qui a supporté contre sa personne une telle opposition de la part des pécheurs, afin que vous ne vous lassiez point, l'âme découragée. Vous n'avez pas encore résisté jusqu'au sang, en luttant contre le péché. »
Hébreux 12:1-4

Non seulement Christ a démontré une patience hors du commun, mais il l'a fait pour nous, pour que nous puissions à notre tour tenir ferme sans nous décourager. Et chercher à lui ressembler chaque jour davantage, comme c'est notre but à tous, implique donc aussi d'apprendre la patience, pour la gloire de Dieu.